Biais et préjugés à l'égard des personnes handicapées

Les préjugés et les biais cognitifs affectent l'intégration des personnes en situation de handicap sur leur lieu de travail. Malgré toutes les campagnes de sensibilisation, certains de ces préjugés persistent dans les esprits, limitant l'accès au travail, ralentissant les performances et accentuant les inégalités. Voici un aperçu des principales remarques négatives que l’on peut entendre liées à l'emploi de salarié.e.s en situation de handicap.

Combien de fois ai-je entendu des interrogations quant à la possibilité de faire confiance à une personne en situation de handicap pour exercer un emploi ? Pourtant, seule une poignée d'emplois sont réellement incompatibles avec toutes formes de handicap. Les pilotes de l'armée de l'air sont peut-être les seul.e.s auxquel.le.s je peux penser, en fait.

L'embauche d'une personne visiblement en situation de handicap à un poste exposé, comme l'accueil, peut être un signe de votre engagement : elle signale la volonté de l'entreprise de faire primer les compétences et les aptitudes sur tout le reste. L'accent ne devrait pas toujours être mis sur le handicap et sur ce qu'une personne ne peut pas faire. Nous devrions plutôt commencer à nous intéresser aux capacités, à ce que les gens peuvent faire, à ce qu'ils et elles apportent à une équipe et à leur valeur ajoutée pour une organisation.

Le handicap n'est, en effet, ni une compétence ni une définition de la personnalité d'une personne. Ce n'est donc pas ce qu'un recruteur ou une recruteuse devrait regarder en premier.

L'adaptation des postes de travail nécessite parfois l'achat d'équipements spécifiques : un écran, un siège ou un logiciel de travail adapté, par exemple. Mais c'est loin d'être toujours le cas. Cette idée du coût potentiellement exorbitant des adaptations est liée à une méconnaissance de ce qu'est réellement le handicap sur le lieu de travail.

Beaucoup de gens pensent aux fauteuils roulants, à la cécité et à la surdité, mais oublient que 80 % des handicaps ne sont pas visibles à l'œil nu et que 85 % sont acquis à l'âge adulte. La situation de handicap sur le lieu de travail, c'est avant tout les séquelles ou les conséquences d'une maladie, l'usure physique causée par des gestes répétitifs ou des accidents de travail, ou encore les personnes ayant des difficultés cognitives ou d'apprentissage (la fameuse famille des "dys-" pour dyslexie, dyspraxie, etc.)

Dans la plupart des cas, les aménagements reposent sur le bon sens et l'adaptation de l'organisation ou des fonctionnalités déjà proposées dans l'entreprise, comme un véhicule automatique. Par exemple, les personnes diabétiques doivent avoir accès à une salle de repos privée pour pouvoir vérifier leur taux d'insuline et faire leurs injections à l'abri des regards, tout comme elles apprécient les horaires de travail réguliers. Les personnes ayant des difficultés à marcher peuvent avoir besoin d'horaires décalés pour éviter les heures de pointe dans les transports publics. Les personnes qui ont des limitations concernant la charge qu'elles peuvent porter devraient être exemptées et placées dans un poste où elles n'ont pas à déplacer quoi que ce soit. C'est lorsque les personnes ont besoin d'un changement complet de mission au sein, ou en dehors, de l'entreprise que les coûts les plus élevés peuvent survenir.

Parfois, un niveau de performance inférieur est la cause directe d'un handicap. Le plus souvent, il s'agit simplement d'une question de compétences. Il est terrible qu'une seule personne puisse représenter un groupe.

Dans toutes les entreprises, certain.e.s employé.e.s sont plus performants que d'autres pour d'innombrables raisons, qui ne sont pas toutes liées à la situation de handicap, bien au contraire. Remettre en cause le recrutement des hommes en général simplement parce qu'un a été moins performant dans le poste occupé, c'est du jamais vu. Pour les femmes, selon le niveau de poste, c'est un peu plus discutable (l'idée que les femmes ont un niveau de performance inférieur à celui des hommes persiste encore malheureusement dans certains esprits). Mais avec les personnes en situation de handicap, un échec, un manque, une mauvaise expérience devient vite une généralité.

Certains types de handicap nécessitent un changement dans la façon de mesurer la performance : autant le savoir et l'intégrer tout de suite pour préparer l'esprit de chacun et chacune.  Dans la plupart des cas, les handicaps n'affectent pas la performance d'une équipe. Parfois, il l'augmente même de diverses manières (remotivation, solidarité, flexibilité des méthodes de travail, etc.).

Derrière cette affirmation se cache la peur. La peur de la différence, la peur de ce que nous ne connaissons pas et qui nous rend moins à l'aise. La peur de ne pas savoir comment se comporter. C'est le manque d'habitude qui alimente cette peur. Si nous étions habitués à travailler avec des personnes en situation de handicap, si nous voyions plus souvent des personnes en situation de handicap dans toutes les sphères de notre société, dans nos entreprises, dans les médias, dans les milieux politiques, etc. nous ne nous poserions plus jamais cette question. Au contraire, nous saurions que l'intégration d'un nouveau collègue ou une nouvelle collègue, quel qu'il ou elle soit, demande du temps et de l'adaptation. Il faut du temps pour apprendre à se connaître, pour définir de nouvelles habitudes et pour concevoir des façons de travailler ensemble au sein d'un groupe, dans le but d'atteindre un objectif commun.


 

Florence Alix-Gravellier

Médaillée de bronze aux Jeux paralympiques de Pékin en 2008, Florence Alix-Gravellier a atteint la première place mondiale du tennis en fauteuil roulant en double (2005) et la deuxième place mondiale en simple (2006). Six fois championne de France, elle est diplômée de l'Institut d'études politiques de Bordeaux et titulaire d'un MBA en management du sport. Gestionnaire de projets stratégiques dans de grandes entreprises, elle est aujourd'hui autrice, conférencière et vice-présidente de la Fédération française de tennis.

 
 
Florie Benhamou